Inauguré le 6 décembre 2018, à Dakar, le Musée des Civilisations Noires (MCN) est un véritable hommage à l’Afrique à travers son histoire, du temps de l’âge de pierre jusqu’aux jours contemporains. Rendre hommage, mais, aussi, une certaine manière de récupérer le patrimoine africain volé lors de la colonisation…
Lors de notre séjour à Dakar, capitale du Sénégal, pays de Léopold Sédar Senghor, nous avons pu visiter le Musée des Civilisations noires (MCN) qui propose un circuit à la découverte ou la redécouverte de l’histoire de ce continent, méprisée par les livres d’histoire occidentaux.
Financé sous forme de don par la Chine, à raison de 22 milliards de francs CFA, et construit entre la gare de Dakar -une gare historique puisqu’elle est la première d’Afrique de l’Ouest- et le Grand théâtre, le MCN s’étend sur une surface répartie comme suit : «13.785 m2 de surface bâtie répartis sur quatre niveaux avec une spécialisation des espaces, le tout reposant au cœur d’une esplanade de 10.000 m2», 907 m2 au rez-de-chaussée pour les réserves, 3.239 m2 pour les galeries fermées et environ 4000 m2 dans le hall central pour les galeries semi-ouvertes.
De forme circulaire, qui n’est pas sans rappeler la forme des cases (sans, toutefois, le toit en forme de chapeau), le musée abrite différentes salles d’exposition, un auditorium, ainsi que des bureaux. Au centre du bâtiment principale, soit le musée, trône la sculpture d’un baobab, arbre symbolique de l’Afrique de l’ouest principalement. Tout autour, au forme circulaire, s’étendent les racines de ce berceau de l’humanité qu’est l’Afrique.
De ces racines, sont nés des civilisations qui ont offert à l’Histoire une multiplicité d’œuvres, d’ouvrages, et d’hommes : du Tchad et l’Ethiopie où sont apparus les premiers hominidés et leurs vestiges, en passant par les pharaons d’Egypte, les religions (d’ailleurs l’islam tient une grande place dans ce musée), les arts, les costumes, les révolutionnaires qui ont lutté contre la colonisation, comme Thomas Sankara, pour arriver à l’époque contemporaine.
Une capacité de 18 mille pièces

Plus de 500 pièces sont exposées mais le musée peut accueillir jusqu’à 18 mille pièces. Nous y avons trouvé, par exemple, des crânes de différents hominidés, et des pièces rares comme le sabre d’El Hadji Oumar Tall (1796-1864), souverain, chef de guerre, érudit musulman et soufi, membre de la Tijaniyya ou comme la palette de Narmer, une palette à fard, datant du 32e siècle avant notre ère, portant les plus anciennes inscriptions hiéroglyphiques connues. Nous pensons que ces deux objets sont plus des prêts que des dons de la part, pour le premier, du musée d’Orsay, et, pour le second, du musée du Caire.
De savoir si la plupart des objets présentés sont des dons ou des prêts soulève la question de la restitution du patrimoine culturel africain. En effet, en novembre 2018, un rapport réalisé sur la restitution des objets du patrimoine culturel africain estime que «90 % des objets pillés pendant la colonisation de l’Afrique se trouvent encore dans les collections européennes, muséales ou privées».
Les objets du patrimoine culturel africain qui se trouvent en Occident sont soit des butins, soit ont été rapportés suite à des missions d’«exploration» et de «raids» scientifiques, soit des dons de particuliers, ou ont été pris après les indépendances. Pour une restitution juste et légale, il faudrait que pour chaque objet on connaisse la manière dont il a atterri ailleurs. Pas évident quand ces objets se trouvent en dehors des musées, où, normalement, ils doivent être répertoriés.
En tout cas, le Musée des Civilisations noires est prêt à accueillir la restitution d’objets du patrimoine sénégalais, et d’autres pays africains par don.
En attendant, ceux qui auront la chance d’aller à Dakar, le MCN est à visiter au même titre que l’île de Gorée ou encore le monument du millénaire.
Zouhour HARBAOUI