Voir Habib Koité sur scène était déjà un honneur. Et vivre le spectacle qu’il a donné ce vendredi 6 octobre 2023, a fait du beau public de l’Institut français de Côte d’Ivoire, des privilégiés. Habib était dans un bon jour, et il a « joué », de tout son cœur.

La communion qui a débuté autour de 20h 40, après le passage très remarqué (en live) de la chanteuse Aīcha Traoré (nous y reviendrons dans un autre article), a pris un air de « réunion de famille ». Habib, maitre de sa guitare, se laissant emporter par les mélodies qui en découlent, et la foule se faisant témoin de cette belle histoire d’amour qu’il a su tisser avec son instrument de prédilection.
Habib semblait lui parler. Par moment, il la rapprochait tellement de sa tête qu’on croirait qu’il lui chuchotait des choses. En retour, sa guitare s’offrait à lui, diffusant des sonorités qu’il lui aurait demandées après l’avoir consultée (accordée). Mais Habib et sa guitare, n’étaient pas les seuls acteurs de cette soirée mémorable organisée par Wendy&Co.

Habib donnait le ton. Entrainant toujours la foule à travers des sonorités tantôt mélancoliques, tantôt déchainées. Et ses musiciens y entraient de plein pied. Abdoul Wahab Berthé à la basse, Issa Koné (guitare), Charles Coulibaly (piano), Madou Koné (tamani, bara, castagnette…) et Franck Thierry Légré (batterie). Le groupe était Bamada, au sens propre du terme, dans la gueule du crocodile ; transposant les mélomanes dans différentes dimensions connues et méconnues.
Habib a « joué » avec son public à travers une interaction et une complicité empreintes d’humour et de chahut. Les deux entités ont fusionné. Ses petites histoires introductives ou en fin de chanson, comiques, saccadées, teintées parfois d’une honnêteté artistique (comme quand il informe que les mélodies des cornes ont été ‘’samplées’’) ont fluidifié et rendu le spectacle digeste. Souvent, c’était juste pour gagner du temps pour accorder sa guitare.

Bamada avait aussi le secret de faire monter le mercure. Et lorsque la température était haute, enfants (oui des enfants étaient présents) et adultes ne se retenaient plus. Que dire de cette fillette qui a conquis le public avec quelques pas de danse. Elle avait le rythme, le groove et l’harmonie sur la mélodie parfaite.
Bamada savait aussi envouter. « Takamba », sur des airs venus du nord du Mali et ses dunes de sable, gracieusement portés par la guitare sèche et le tamani a fait virevolter ces jeunes dames qui ne pouvaient plus tenir sur leurs sièges. Emportées par le vent, mais surtout par cette sonorité hypnotisante, elles ont dévoilé la grâce et la profondeur qui habitent cette musique à chorégraphie unique.

La force d’Habib, c’est de réussir cette transversalité musicale à travers les genres et les rythmes. Avoir son identité propre en étant multiforme. Avec lui, on a du Salif Kéita, du Ali Farka Touré, un peu d’Ami Koita (ses envolées lyriques), du Richard Bona (son aisance dans le jeu) et sa communication avec la foule, etc. Après environ 2 heures de spectacle, Habib et sa ‘’band’’ ont ramené les spectateurs sur terre, contre leur gré, mettant fin à cette belle rencontre qui restera graver dans les mémoires.

SANOU A.