Par Zouhour HARBAOUI
L’on pourrait présenter la meilleure pièce africaine subsaharienne -et meilleure que les autres pièces présentées- pour les Journées Théâtrales de Carthage, qu’elle ne recevrait aucun prix…
Ah ! Les Journées Théâtrales de Carthage, qui se veulent, depuis leur création, un festival arabo-africain, mais qui sont, depuis 2017, devenus pratiquement un festival arabo-arabe -elles ont juste besoin d’une représentation africaine subsaharienne minime pour ne pas se faire taxer de racistes ! Donc, ah ! les Journées Théâtrales de Carthage, donc l’acronyme JTC me fait penser à Journées Théâtrales de la Connerie (non, ce n’est pas un gros mot. C’est entré dans le langage courant), vont de mal en pis d’édition en édition.
Cela n’a pas loupé pour celle de cette année, soit la 24e, qui s’est tenue du 02 au 10 décembre. Un comité de sélection des plus douteux, puisque la plupart des membres ne connaît aux théâtres d’Afrique subsaharienne. Vous allez me dire que le théâtre c’est du théâtre et peu importe d’où il vient. C’est une erreur de penser cela, car même s’il y a des bases communes, les pièces de théâtre diffèrent d’un pays à l’autre, surtout dans l’approche de la mise en scène et les sujets traités ; sujets sur des réalités vécues qui sont très différentes… Donc un comité de sélection des plus douteux, dont un des membres est un ingénieur-son, qui lors du MASA 2022, s’est considéré comme supérieur et qui était plein d’idées reçues. D’ailleurs, mécontent d’un petit problème, il n’a pas arrêté de dénigrer l’organisation du MASA et, quand je lui ai dit que tous les festivals connaissaient des couacs, m’a sorti texto et avec rage (je m’en souviens encore !) : « Toi tu es toujours à défendre les Noirs !». Sans oublier un autre membre, qui se veut artiste, mais qui n’a rien d’un artiste. Bref !
Déséquilibre flagrant !
Dans la sélection « In », celle de la compétition, il y avait onze pièces : deux tunisiennes (ce qui est normal), huit arabes (Maroc, Algérie, Egypte, Emirats arabes unis, Irak, Jordanie, Koweït et Syrie), et… une africaine subsaharienne (Côte d’Ivoire). Normalement, deux avaient été sélectionnées, mais il y a eu désistement de la pièce burkinabè. Maintenant, question : est-ce normal pour un festival qui se veut arabo-africain d’avoir un déséquilibre flagrant dans la sélection : huit pièces arabes et deux africaines -dans les éditions précédentes, elles étaient trois, quoique certaines ne pouvaient décemment être considérées comme telles, pour plusieurs raisons.
Il y a aussi et peut-être le fait que les metteurs en scène africains subsahariens se sont rendus compte qu’ils étaient très mal accueillis par les JTC et que d’y participer ne leur apporte rien, préférant se présenter à d’autres festivals qui ont lieu en même temps, comme au Togo. Et là j’écris tant mieux ! Ils se sont enfin réveillés !
En tout cas, du coup, cela n’a pas loupé : aucun prix pour la pièce ivoirienne, qui, pourtant, serait de bonne facture (je ne l’ai pas encore vue ; j’ai déjà expliqué dans un précédent article que je boycottais les festivals en Tunisie). Alors vous allez me dire que cela peut paraître logique que l’Afrique subsaharienne n’ait rien obtenu puisqu’elle était représentée par une seule pièce. Pas si logique que cela en fait ! Parce que peu importe le nombre de pièces présentées, si elles sont bonnes, elles méritent un prix. Or, la politique des JTC depuis six ans (depuis le retour de la compétition, en fait) est de ne pas attribuer de prix aux pièces africaines subsahariennes, sauf celui de l’OIF, quand l’Organisation internationale de la Francophonie accepte d’offrir un prix. Cela serait ridicule de donner le prix de l’OIF a une pièce… arabe arabophone !
Un truc bizarre…
C’est la pièce koweïtienne «Mute» qui a obtenu le Tanit d’or. Or, il y a deux choses qui m’intriguent dans l’attribution de ce prix -même si je n’ai pas vu la pièce et vu le niveau du théâtre koweïtien que je connais, cela m’intrigue ! Déjà, quand on va sur le site des JTC, à l’onglet Programmation, puis JTC In, cette pièce est présentée la première -non je ne cherche pas la petite bête, vous n’avez qu’à vérifier ! Puis en cliquant sur la photo, on est envoyé vers la fiche artistique où l’on peut lire que le directeur de production est le Tunisien Oussema Jemai. Vous allez me dire : et alors ? Ben alors, Oussema Jemai a été le coordinateur général de cette édition des JTC et il aurait démissionné le soir de l’ouverture…
Etrange, non ? Et n’allez pas me dire que je fais dans la théorie du complot !